Trop dur de témoigner

[Zaza.]

Pour moi, c'est trop dur de témoigner.
Je suis une juive d'origine polonaise. J'ai perdu toute ma famille dans les camps. Moi et mon frère avons été privés de tout ce qui peut faire la chaleur de relations avec des proches.
Plus je vieillis et moins je supporte de repenser à toutes ces souffrances des déportés.
Ceux qui sont revenus ont dit : mais pourquoi n'a-t-on pas bombardé carrément les camps ? Nous aurions préféré mourir, pour que plus personne ne subisse ça.
On savait ce qui se passait, mais on continuait à envoyer les trains pleins de personnes à exterminer, la SNCF était payée pour ça par l'Etat français; la Résistance n'a pas détourné ces trains. Nous avons vu le reportage à la télé hier soir. La vie de ces gens avait si peu d'importance, tout le monde s'en fichait ?

[Fille du vent.]

C'est vrai que ce n'est pas facile de témoigner, quand la blessure est encore vive, malgré les années.
Mais dire la difficulté de témoigner, c'est déjà apporter un témoignage important, je trouve.
Tu nous dis beaucoup de choses, Zaza. La douleur d'avoir été privée de famille; l'impossibilité d'oublier la souffrance des siens; l'incompréhension devant l'indifférence, la lâcheté, et devant le souci de l'argent ou de la sécurité plus fort que la simple humanité. Merci de ton témoignage !

[Philospi.]

Bonsoir,

Je suis moi aussi touché par ton témoignage ZAZA, et il est évident que toute cette souffrance, ces conditions, tous ces travers humains qui ressurgissent de manière exponentielle ne peuvent que provoquer ce sentiment de profonde injustice et de colère malgré le temps qui est passé. Cette colère que l'on perçoit entre les lignes de ton témoignage.
Comment se révolter contre quelque chose du passé, sur lequel on ne peut rien changer.
Elle est quelque fois destructrice et sournoise. Mais qui ou qu'est ce qui pourrait soulager cette souffrance si ce n'est, dans une modeste mesure, l'amitié et qui plus est, l'amitié inter religieuse comme une magnifique promesse d'avenir.
Amicalement
Philospi

[Tamara]

Je t'admire zaza d'avoir eu le courage de témoigner d'une manière si forte et si poignante ... tu as su en peu de mots évoquer tout le mal de la guerre (souffrance, lâcheté des hommes, ignominie...) ... personnellement je n'aurais pas eu le courage de l'écrire.

Je suis de tout coeur avec toi.

Tamara

[Zaza.]

Merci pour ces réponses pleines de compréhension.

[De jure]

Après l'action introduite par la fille d'un déporté juif devant le tribunal administratif de Paris, contre la SNCF et l'Etat français, puis le dépôt de quatre cents autres dossiers similaires, le Conseil d'Etat a conclu, lundi 16 février 2009, que la "responsabilité" de l'Etat français était engagée dans la déportation des Juifs sous le régime de Vichy. Et ce, "en raison des dommages causés par les agissements qui, ne résultant pas d'une contrainte directe de l'occupant, ont permis ou facilité la déportation à partir de la France de personnes victimes de persécutions antisémites".
… Par exemple "des arrestations, internements et convoiements à destination des camps de transit, qui ont été, durant la Seconde Guerre mondiale, la première étape de la déportation de ces personnes vers des camps dans lesquels la plupart d'entre elles ont été exterminées".
Cet avis du Conseil d'Etat sera publié au Journal officiel.